L’évocation des dieux est-elle thérapeutique ?
VOCATUS AT QUE NON VOCATUS DEUS ADERIT
Inscription gravée dans la pierre au-dessus de la porte d’entrée de la maison de C. G. Jung à Kusnacht
Appelé ou non appelé Dieu sera présent.
Cette maxime fut prononcée par l’oracle de Delphes lorsque les Lacédémoniens voulurent partir en guerre contre les Athéniens.
Peut-on dire qu’évoquer les dieux dans une consultation astrologique est un acte thérapeutique. Je répondrai oui et non et ainsi avec des planètes en Balance dans mon thème, je me ne serai pas impliqué et j’aurais contenté tout le monde. Plus sérieusement, je serai tenté de dire que certains cas, c’est thérapeutique et dans d’autres cas, cela ne l’est pas. C’est cette réflexion sur ma pratique que je vais essayer de vous faire partager en mettant l’accent sur l’utilisation que nous faisons du symbolisme astrologique car nous utilisons tour à tour les signes et les symboles sans toujours bien faire la différence entre les deux.
L’origine étymologique d’évoquer vient du latin vocare appeler (voix : vox vocis), c’est-à-dire appeler à soi, faire apparaître par des procédés magiques. Ce terme ne s’emploie dans le sens qu ‘en parlant des âmes, des esprits, évoquer les âmes des morts. Rappeler une chose oubliée, rappeler un souvenir.
Les évocations des dieux, des démons et des âmes des morts se retrouvent au nombre des pratiques de tous les peuples anciens. Ulysse y a recours dans l’Odyssée mais outre ces évocations qui appartiennent aux pratiques religieuses, les Romains donnaient encore le nom d’évocation à une formule de prière adressée aux divinités tutélaires des villes qu’ils assiégeaient pour les engager à abandonner leurs anciens protégés et passer du côté de Rome. Cette prière devait être prononcée par le général qui commandait l’armée assiégeante pendant un sacrifice et lorsque les auspices étaient favorables.
L’évocation n’est pas à confondre avec son paronyme invoquer.
Invoquer du latin invocare signifie en appeler à – appeler à son secours, à son aide.. Invoquer le nom de Dieu.
L’approche astrologique fait appel à des planètes dont les noms suggèrent des divinités gréco-latines. Que représentent ces divinités dans notre culture monothéiste? Sont-elles encore vivantes comme elles pouvaient l’être pour les généraux romains avant le combat? Et que faisons-nous lorsque nous les nommons, les évoquons?
Signes et symboles
Le signe
Les données astrologiques peuvent être envisagées et abordées sous l'angle de signes ou sous l'angle de symboles. La démarche de l’astrologue et de son consultant sont différentes selon qu’elles se situent dans l’univers du signe ou celui du symbole. Il est sûr que lorsque l'on interprète les données astrologiques sous l'angle de signes, ces derniers sont comme des poteaux indicateurs qui ne signifient qu'une chose et une seule à laquelle l'individu doit s'adapter car, c'est inscrit dans le ciel, c'est inscrit dehors.
Le signe est selon Jung, « un phénomène perçu qui manifeste un phénomène non perçu, la fumée que l’on voit étant un signe du feu que l’on ne voit pas. » Lorsque nous utilisons les signes en astrologie la démarche est orientée vers le conseil et quelquefois ressenti par le consultant comme une injonction des dieux planétaires en transit, est-ce une approche thérapeutique ? j’en doute.
Cette approche est beaucoup utilisée dans la dimension divinatoire de l’astrologie à savoir l’astrologie horaire, cette dimension n’a rien de particulièrement thérapeutique.
La confrontation à la réalité extérieure et l'aide que l'astrologie peut apporter à ce niveau-là est trop souvent ramenée à décrire un faisceau prédictif d'évènements possibles, donc de faire de l'astrologie un outil d'anticipation sur le futur.
Il n’y a pas de fumée sans feu.
Baliser, limiter, comprimer ce futur autour de faits et évènements appréhendables ou rassurants devient des défis ou challenges que les astrologues relèvent par désir de pouvoirs magiques ou autres. Si cette seule approche de l'astrologie fonctionnait, cela se saurait depuis longtemps.
L'aptitude à affronter des mutations sur le plan du signe, c'est à mon sens s'adapter à la société changeante extérieurement afin de continuer à développer un sentiment de sécurité dans un univers en mutation. L'astrologie dans cette optique est un outil efficace pour se rassurer face au monde effrayant que l'on ne peut ni maîtriser ni changer. Elle joue un rôle de substitut maternel et donne des réponses opératives, un mode d'emploi face à la réalité extérieure, les signes ou poteaux indicateurs balisent la route et sécurisent le voyageur ou le pèlerin.
Est-elle thérapeutique dans le sens de soigner ? Certes, mais elle soigne le symptôme, rassure une personne inquiète, la protège parfois des grands tourments de la vie, mais ne lui permet pas forcément de se mettre en relation avec sa propre dimension psychologique et le plan de l’âme.
Le symbole
Si l'interprétation des données astrologiques se fait sous l'angle des symboles, la démarche est totalement différente. La signification des symboles n'est pas univoque mais polymorphe. Les symboles ont besoin d’êtres ressentis, éprouvés, différenciés, digérés et assimilés pour être compris et significatifs.
Pour René Alleau (la science des symboles) :
« Un symbole ne signifie pas, il évoque et focalise, assemble et concentre, de façon analogiquement polyvalente, une multiplicité de sens qui ne se réduisent pas à une seule signification ni à quelques-unes seulement. Une note de musique n’a pas non plus de sens déterminé une fois pour toutes, bien qu’elle ne soit pas quelconque. Elle dépend aussi étroitement de son contexte rythmique et sonore que le symbole du contexte mythique et rituel qui lui est associé.
Pénétrer dans le monde des symboles, c’est essayer de percevoir des vibrations harmoniques et, en quelque sorte, de deviner une musique de l’univers. Il n’y faut pas seulement de l’intuition mais aussi un sens inné de l’analogie, un don qu’on peut développer par l’exercice mais qui ne s’acquiert pas. Il y a une oreille symbolique comme il y a une oreille musicale et qui est particulièrement indépendante du degré d’évolution culturelle des individus... ».
Le terme symbole a bien là tout son sens, car symbole étymologiquement vient du grec SUMBOLON signe et le verbe SUMBALLEIN jeter ensemble réunir.
Le premier sens grec est topologique, c’est celui de symbole. Il désigne proprement l’assemblée des eaux, le lieu où elles se réunissent, où elles se jettent ensemble et coulent ensemble. Ce sens verbal de SUMBALLEIN essentiellement dynamique est utilisé avec la même signification depuis Homère.
Pour C. G Jung, il existe des symboles dont la signification est à peu près fixe, mais qu’il faut se garder avec intransigeance au cours de l’interprétation de mettre en rapport avec des choses connues et des concepts forgés à l’avance. Toutefois, poursuit-il s’il n’existait pas de tels symboles à signification fixe en principe, nous serions dans l’impossibilité de préciser quoique ce soit de la structure de l’inconscient, nos efforts de discrimination ne pourraient s’accrocher à rien de stable. Il relève cette apparente contradiction en attribuant aux symboles relativement fixes des contenus de caractère indéterminé.
Mais il ajoute
« ... Sans cette indétermination, ces symboles ne seraient pas des symboles mais des signes ou des symptômes. Il retient le symbole comme une entité inconnue, difficile à saisir, et en dernière analyse, jamais entièrement définissable, plutôt que s’appuyer sur une conviction dogmatique, édifiée sur l’illusion qu’un terme familier à l’oreille indique forcément une chose connue.
Dans sa pratique Jung utilisait les symboles en rapport avec la situation consciente, c’est-à-dire en renonçant à tout savoir préalable et de se garder de toute suffisance infaillible et de rechercher ce que les choses signifiaient pour la personne.
Le processus de symbolisation
Affronter des mutations sur le plan des symboles, c'est en fait se relier à une réalité changeante interne, connaître ou reconnaître des éléments de sa propre nature qui pouvaient être partiellement ou totalement inconscients. Un symbole évocateur est un symbole riche, vivant et varié qui ne peut être limité à une évocation limitative ne permettant pas une reconnaissance subtile et sensible.
Lorsque l’astrologue évoque Jupiter, Saturne et les autres dieux ou déesses de l’Olympe ou de l’Hadès, il ne doit jamais oublier que le thème n’est qu’un support à l’entretien et qu’en face de lui se tient une personne. L’histoire de cet être sera plus importante que le thème servant de support à la relation qui s’établit au cours de l’entretien.
Stephen Arroyo le formule ainsi dans la pratique de l’astrologie :
« ...La principale valeur de l’astrologie tient dans sa capacité à révéler un ordre supérieur dans le chaos apparent de la vie quotidienne. Elle peut révéler, mais ne peut forcer une révélation à se faire. Souvent, l’ordre cosmique se révèlera après une discussion foncièrement honnête avec un client, après avoir écouté la personne, après avoir évoqué ses pensées et sentiments profonds. Ce n’est qu’après que l’ordre cosmique peut commencer à faire surface et se révéler... »
Cet ordre cosmique reflète à mon sens un archétype central présent à l’état latent en chacun de nous et que C.G. Jung a appelé le Soi, centre organisateur qui permet la dialectique entre le conscient et l'inconscient, le moi et le non moi. Le Soi et l'inconscient existent au préalable, le moi et le conscient ne se constituent que petit à petit et restent donc subordonnés en quelque sorte au Soi.
Le Soi est un symbole de totalité et représente un principe organisateur, une dimension vers laquelle nous sommes attirés en tant qu'êtres humains.
Mettre de l’ordre cosmique à l’intérieur de sa psyché est une véritable démarche thérapeutique et le pouvoir d’évocation des dieux et déesses présents en chacun de nous aide à la représentation. Ainsi des personnages intérieurs sont éclairés tour à tour par les transits et progressions et, nommés à ces moments opportuns (le Kairos pour les Grecs) par l’astrologue évocateur et accompagnateur.
L’évocation des dieux dans la démarche astrologique représente une ouverture à l’univers souvent inexploré en chacun de nous. L’accès à cet univers se déroule autour d’un cercle, d’un mandala qu’est le thème astral. Que nous le voulions ou non, que nous en soyons conscients ou non, le fait de se réunir autour d’un cercle crée une forme de rituel.
Vocatus at que non vocatus deus aderit.
La place que chacun occupe dans cette rencontre est symboliquement importante. L’astrologue sera toujours au nord de la carte c’est-à- dire du côté du Fond du Ciel, le consultant est assis au sud de la même carte, le Milieu du Ciel en face à face avec l’astrologue.
Dans ma pratique de la consultation, je me suis aperçu que spontanément, je montrais le thème à mon consultant, en le retournant pour lui montrer le dessin de son thème au début de l’entretien. Montrer cette représentation est une façon de susciter son propre pouvoir d évocation et, depuis que je me suis aperçu de ce geste, c’est devenu un rituel. Cette démarche m’a fait penser aux rites chamaniques des Indiens Hopis lorsqu’ils utilisent leur système des roues médecines.
Cette approche crée un espace sacré, un temenos, c’est-à-dire un morceau de terrain mis à part et dédié à un dieu où un rituel de guérison peut se dérouler. En repérant ainsi les points cardinaux comme le font les Hopis, un centrage psychique peut s’opérer même si le client reste tout au long de l’entretien à la position Sud, c’est-à- dire du côté de la culmination du soleil et de la possibilité associée de conscientisation. Qu’il se soit positionné au Nord de son thème au début de l’entretien, c’est l’inciter déjà à trouver ou retrouver le Nord qu’il pensait avoir perdu avant le rendez-vous.
La symbolique du cercle a également son importance car selon C. G. Jung dessiner un cercle protecteur est « un moyen magique vieux comme le monde utilisé par tous ceux qui ont un projet particulier et secret. Ils se protègent ainsi des dangers de l’âme... Ce cercle tabou devient un temenos dans lequel ou à partir duquel il est possible d’affronter l’inconscient. »
Par ce rituel de symbolisation, nous accédons à un autre sens du symbole que donne René Alleau :
«Le symbole n’appartient pas entièrement aux signes de l’univers humain du discours, ni aux seules catégories des concepts ou de l’imaginaire. La fonction symbolique est inséparable de son orientation sacrale ou de sa visée hiérophanique des puissances numineuses ou non humaines auxquelles les mythes et les rites relient l’être humain en réunifiant l’anthropos et le cosmos par la puissance du logos qui n’est pas ici langage mais verbe et parole ressuscitée recréée au-delà du sens culturel et social des mots de la tribu.»
L’astrologie contient une dimension chamanique, que nous-mêmes astrologues refusons souvent d’envisager car dans le désir de socialisation ou de reconnaissance de la part des scientifiques, cela est très régressif de se situer sur ce plan-là. Pourtant de nombreux sociologues et psychosociologues vont étudier les rites chamaniques d’autres cultures avec le plus grand sérieux et reconnaissent leurs vertus thérapeutiques alors qu’ils dénoncent par ailleurs la démarche astrologique. Il serait intéressant de connaître le point de vue de François Roustang ancien jésuite, psychanalyste et thérapeute sur notre pratique car il dénonce dans ses ouvrages la façon dont la psychanalyse s’est développée en France.
Dans une démarche où la dimension symbolique est privilégiée, l’interprétation devient superflue dans certains cas et c’est ce qu’écrit Stephen Arroyo dans un petit ouvrage que je vous recommande de lire qui s’intitule la pratique de l’astrologie.
« ...Trop d’interprétation dans un moment difficile pour une personne ne fera que l’enfoncer plus profondément dans un trou intellectuel, un trou terriblement profond sans doute causé par un excès d’analyse. Nous n’allons pas au bout de notre potentiel dans cette profession d’aide si nous nous contentons avec nos clients d’analyser et d’interpréter une multitude de détails.
En insistant sur la compréhension plutôt que l’interprétation, je veux dire qu’il est du devoir de l’astrologue d’encourager le client à se faire face plutôt qu’à se fuir... Une simple interprétation pousse souvent le client à s’échapper de sa situation et de ses sentiments réels. En d’autres termes, il semble souvent qu’un astrologue trop analytique essaie de supprimer une légère souffrance en la niant ou la rejetant pour la remplacer par du verbiage. Ce n’est pas vraiment curatif même si cela procure au client un soulagement éphémère... »
Signaliser et symboliser
C’est en quelque sorte relier le ciel et la terre.
Tout l'art de l'astrologie consiste à pouvoir associer une démarche où l'interprétation puisse tour à tour allier une approche où la réalité extérieure et la confrontation à cette réalité puissent servir l'être humain.
L'évocation d'une réalité interne et la confrontation à cette réalité sont liées à une démarche qui se veut psychologique où pour comprendre ce qui se passe au-dehors, il est d'abord indiqué d'aller voir ce qui est au-dedans ; d'aller rechercher ce qui a motivé consciemment ou plus souvent inconsciemment la mise en acte. Cette démarche aborde les données astrologiques comme un ensemble de symboles évocateurs qu'il est bon de connaître ou reconnaître.
Ces données astrologiques tant qu'elles ne sont pas connues ou reconnues se manifestent au-dehors sous forme de signes et alimentent ce que l'on nomme en psychologie la projection. Ce mot fourre-tout est employé, souvent à tort et à travers, pour désigner en réalité une intériorité, un film qui, sous l’effet d'une lampe, une énergie de vie se projette sur un écran, un autre, une situation qui fait que cet autre, cette situation n'existe pas en tant qu'autre, mais n'est que le support d'une image interne: le film.
Nos ancêtres lorsqu'ils ont regardé le ciel et commencé à observer ses mouvements cycliques ont vu des astres, des "estres", les ont organisés sous formes de constellations et ont projeté sur cet écran si lointain, si animé mais sans réponse, leurs peurs, leurs angoisses, leurs attentes sous formes d'animaux que nous nommons zodiaque.
Là était leur support de projections.
Des millénaires plus tard, nous utilisons toujours ce support qui a évolué sur lequel nous projetons toujours les mêmes peurs, angoisses ou attentes. Seulement depuis des millénaires, nous avons acquis des connaissances et que ce soit par les théories d'abord des gnostiques, néoplatoniciens, fondateurs des théories alchimiques ou plus récemment par la physique et la psychologie des profondeurs, nous avons appris que ce qui est en haut est comme ce qui est en bas. La façon dont nous voulons voir le dehors et appréhender les autres est en fait une projection de ce qui se déroule au plus profond de notre être. Pour illustrer ce que je viens d'évoquer, je reprendrai une citation de C. G. Jung à propos de l'astrologie et de Paracelse:
«...Le ciel étoilé est bien véritablement le livre ouvert de la projection cosmique, le reflet des mythologèmes, des archétypes. Dans cette vision des choses, l'astrologie et l'alchimie, les deux antiques représentantes de la psychologie de l'inconscient collectif se tendent mutuellement la main.»
Les Racines de la Conscience p 514 - 515.
Cependant, n'avoir des données astrologiques qu'une lecture psychologique n'aide pas forcément plus qu'une stricte lecture informative et, ce pour principalement deux raisons.
- L'astrologue devient psychologue, ce qui nécessite qu'il se soit lui-même confronté à sa propre réalité interne par le biais d'une confrontation accompagnée à son propre inconscient. Ce n'est malheureusement pas toujours le cas dans la pratique de ceux qui veulent s'engager dans cette voie périlleuse, d'où le risque de projection de leur propre problématique sur les données astrologiques qui leur sont présentées.
- L'astrologue se réfugie dans une lecture psychologique du thème et ne permet pas forcément au consultant de trouver des pistes pour répondre aux défis qui se présentent dans sa réalité de vie. Il ne faut pas oublier que lorsque l'on va consulter un astrologue c'est que quelque chose ne va pas ou ne va plus dans sa propre vie et cela est une réalité. Il y a des faits qui indiquent cela, ils peuvent être reliés à des transits et à des progressions.
Donner des pistes, aider le consultant à trouver des solutions, ce n'est pas faire les choix à sa place, ce n'est pas lui prédire ce qui va lui arriver, lecture liée à une vision évènementielle. La solution n'est pas à l'extérieur de la personne mais liée à la mise en acte de choix internes.
Le psychologue ou psychanalyste ne se positionne jamais de cette façon-là, car selon certaines écoles, ce genre de conseil est souvent appréhendé comme un passage à l'acte. Il n'agit pas pour l'autre, il conseille, il s'implique avec sa personnalité.
Par contre l'astrologue, par le pouvoir évocateur que lui permet le symbolisme astrologique, peut envisager un faisceau de propositions, de manifestations du symbole qui peuvent permettre à la personne, de faire des choix, de se positionner dans la problématique qui est la sienne à ce moment-là. Ce pouvoir évocateur est en réalité une dynamique polaire entre intériorisation et extériorisation du symbolisme astrologique, c'est le fil du rasoir sur lequel doit se tenir l'astrologue, un jeu perpétuel entre dehors et dedans qui ramène sans cesse le consultant à l'acceptation de sa filiation commune à toutes les créatures et à reconnaître l'unité de l'univers. Reconnaître ce qui est dehors, comme ce qui est dedans et poursuivre ainsi son cheminement ou son voyage et se relier au monde en étant plus en accord avec sa véritable nature.
Rappelons-nous les premiers vers du poème de René Char :
Tout ce qui se dérobe sous la main est ce soir, essentiel. L’inaccompli bourdonne d’essentiel.
Dans ma pratique, j’utilise de façon différenciée les transits et les progressions secondaires avec lesquels, j'essaye d'alimenter l'évocation, va-et-vient entre le monde intérieur et la réalité extérieure.
Quel écho, quelle résonance cela a-t-il en moi ? et comment me relier au monde de façon plus juste et plus sensible ?
Les progressions secondaires sont liées à la rotation de la terre sur elle-même puisque selon cette technique, ce qui se passe en vingt-quatre heures équivaut à ce qui se passe en une année, c’est-à-dire une révolution orbitale de la terre. Une giration sur elle-même est à mettre en relation avec sa rotation autour du Soleil. Il y a par cette technique et principalement l'étude de la lunaison progressée, la possibilité d'intérioriser ce qui se déroule dans la relation à l'extérieur.
Les transits sont liés au mouvement permanent du ciel au-dessus de nos têtes, donc ces signes ou symboles visibles ou invisibles au-dessus de nos têtes peuvent être évocateurs de la manière dont nous pouvons répondre à ces défis qui se présentent et dont nous allons agir, extérioriser ce qui a d'abord été ressenti au-dedans.
Associer l'utilisation des progressions secondaires et des transits dans une lecture dynamique des données astrologiques revient à essayer de créer une dynamique évolutive, afin de pouvoir acquérir une plus grande liberté intérieure et extérieure.
Selon Stephen Arroyo,
«...nous touchons à quelque chose de sacré écrit-il lorsque nous conseillons une autre personne sur ses propres besoins, ses sentiments et ses aspirations les plus profondes. Elle n’est pas un objet qui sert à mettre en valeur notre propre ego, ni quelque chose que nous pouvons traiter comme de l’argile et manipuler. Il s’agit d’une interaction complètement sacrée. Et il faut être à son niveau de conscience le plus élevé pour interpréter le cosmos et donc la vie de cette personne...Si nous la laissons être elle-même et que rien ne se passe, nous nous retrouverons tous les deux silencieux et maladroits ».
Mais si les deux sont réunis dans une même démarche : le besoin d’amener à la conscience, ce qui est inconscient ou compulsif, le problème du soin et de la guérison est clairement posé, et en ce sens, l’évocation des dieux aura des vertus thérapeutiques.
L’astrologie reste toujours selon Arroyo « l’un des outils très rares qui peuvent aider la conscience à s’élever pour mieux percevoir ces forces qui nous motivent inconsciemment mais puissamment, et qui contrecarrent souvent notre propre intégration et nous empêchent ainsi de guérir. C’est en ce sens que conseil astrologique et guérison sont directement liés. Mais c’est là que commence l’art du conseil ; comment susciter et écouter les choses. »
Gardons à notre discipline le statut particulier dans lequel elle se trouve, chercher un cautionnement psychologique ou scientifique, par un pseudo statut de psychologue ou psychanalyste astrologue, c'est également faire perdre à l'astrologie sa spécificité de contre-culture. Il ne s'agit pas de normaliser, mais d'aider l'autre à aller vers une rencontre plus profonde, plus authentique avec lui-même et, en ce sens l’évocation des dieux aura des vertus thérapeutiques.
Je vous remercie.
Bibliographie
La science des symboles - René Alleau - édition Payot
Pratique de l’astrologie - Stephen Arroyo - éditions du Rocher L’homme à la découverte de son âme - C.G. Jung - édition Payot Les Racines de la Conscience – C.G. Jung - édition Buchet - Chastel Clefs pour l’astrologie - Jacques Halbronn - édition Seghers
La pratique de l’astrologie - Dane Rudhyar - Librairie de Médicis